Une manifestante brandit un drapeau palestinien lors d’une marche de soutien à Gaza à Londres, le 25 juillet 2025. SEIYA TANASE / NURPHOTO VIA AFP
Pour aller plus loin
Le mouvement est en marche. Alors que dix pays avaient annoncé leur intention de reconnaître l’Etat palestinien lors d’un sommet international ce lundi, à la veille l’ouverture de l’Assemblée générale des Nations unies à New York, trois d’entre eux ont pris les devants, annonçant dès ce dimanche 21 septembre la reconnaissance de la Palestine.
Canada, Australie et Royaume-Uni
C’est le Canada qui a ouvert le bal, par la voix de son Premier ministre Mark Carney, disant vouloir ainsi « préserver la possibilité d’une solution à deux Etats ».
« Le Canada reconnaît l’Etat de Palestine et offre de travailler en partenariat afin de porter la promesse d’un avenir pacifique pour l’Etat de Palestine et l’Etat d’Israël. Le Canada inscrit cette mesure dans le cadre d’un effort international concerté visant à préserver la possibilité d’une solution à deux Etats », affirme-t-il à la veille d’un sommet à l’ONU lors duquel la France et une poignée d’autres pays, doivent confirmer leur reconnaissance formelle de l’Etat palestinien.
D’une même voix, l’Australie « reconnaît officiellement l’État indépendant et souverain de Palestine », a annoncé le Premier ministre australien Anthony Albanese.
« Ce faisant, l’Australie reconnaît les aspirations légitimes et de longue date du peuple de Palestine à un Etat qui lui soit propre. »
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Prise de parole similaire pour le Premier ministre britannique Keir Starmer, qui a annoncé dimanche la reconnaissance officielle par le Royaume-Uni de l’Etat de Palestine afin de « raviver l’espoir de paix et une solution à deux Etats » entre Israéliens et Palestiniens.
« Aujourd’hui, pour raviver l’espoir de paix et d’une solution à deux États, je déclare clairement en tant que Premier ministre de ce grand pays, que le Royaume-Uni reconnaît officiellement l’État de Palestine », a annoncé Keir Starmer, dans une déclaration filmée publiée sur les réseaux sociaux.
Keir Starmer avait annoncé en juillet que son pays allait reconnaître un Etat palestinien à l’occasion de l’Assemblée générale de l’ONU, sauf si Israël prenait une série d’engagements, dont celui d’un cessez-le-feu dans la bande de Gaza. Un objectif loin d’être atteint, alors qu’Israël a lancé cette semaine une vaste campagne militaire terrestre et aérienne à Gaza-ville, dans le nord du territoire palestinien, pour y anéantir le Hamas.
Ces trois nouvelles reconnaissances viennent porter le nombre d’Etats reconnaissants la Palestine à 151 sur les 193 Etats présents à l’ONU. Lors d’un sommet lundi coprésidé par la France et l’Arabie saoudite qui doit se pencher sur l’avenir de la solution à deux Etats à la veille de l’Assemblée générale de l’ONU, sept autres devraient suivre demain (Andorre, Belgique, Luxembourg, Portugal, Malte, Saint-Marin et la France), portant donc à 158 Etats sur 193 la liste des Etats reconnaissant la Palestine, soit près de 82 % des pays du monde !
Comme le montre notre carte, cette reconnaissance a débuté dès 1988, par la plupart des pays africains et du bloc soviétique. A contrario, l’Amérique latine et les premiers pays européens ont tardé à reconnaître l’Etat palestinien. Aujourd’hui, seuls les Etats-Unis, quelques Etats européens (Allemagne, Italie, Finlande, Grèce…) et une poignée d’autres Etats dans le monde ne reconnaissent pas encore la Palestine (le Cameroun, la Birmanie ou encore, bien évidemment, Israël)
Le Portugal doit également annoncer dimanche sa reconnaissance de l’Etat palestinien.
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« Pas la panacée »
Lucide, le Premier ministre canadien Mark Carney sait pertinemment que cette reconnaissance ne suffira pas :
« Le Canada ne se berce pas d’illusions : il sait que cette reconnaissance n’est pas la panacée. Cependant, elle s’harmonise pleinement avec les principes d’autodétermination et les droits fondamentaux de la personne inscrits dans la Charte des Nations Unies et les politiques préconisées par le Canada depuis des générations. »
Une manifestation de soutien à Gaza, à Edmonton, au Canada, le 20 juillet 2025. ARTUR WIDAK / NURPHOTO VIA AFP
Et Mark Carney d’anticiper les critiques israéliennes : « La reconnaissance d’un Etat de Palestine dirigé par l’Autorité palestinienne donne des outils de plus à ceux qui souhaitent une coexistence pacifique et la fin du Hamas. Elle ne légitime pas le terrorisme ni ne le cautionne. De plus, elle ne compromet aucunement le soutien inébranlable du Canada à l’égard de l’Etat d’Israël, de son peuple et de sa sécurité – une sécurité qui ne pourra être garantie qu’à l’atteinte d’une solution globale à deux Etats. »
« Près de deux ans après les attaques barbares du 7 octobre, les terroristes du Hamas détiennent toujours des otages » et « la crise humanitaire à Gaza d’origine humaine s’est encore aggravée », a insisté Keir Starmer, dénonçant également « l’accélération » de la colonisation en Cisjordanie.
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Il a aussi répété que reconnaître l’Etat de Palestine « n’était pas une récompense envers le Hamas, parce qu’elle signifie que le Hamas ne peut avoir aucun avenir, aucun rôle dans un futur gouvernement (palestinien), ni aucun rôle dans la sécurité » des territoires palestiniens. Il a annoncé que son pays prendrait de nouvelles sanctions contre le Hamas « dans les prochaines semaines ».
Le chef de la mission palestinienne au Royaume-Uni Husam Zomlot a salué auprès de l’AFP « cette annonce historique » pour la Palestine, qui « corrige une injustice » envers les Palestiniens.
Husam Zomlot découvre, entouré de son équipe, la déclaration du Premier ministre britannique Keir Starmer. JUSTIN TALLIS / AFP
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Israël estime que son existence est mise « en danger »
Ces annonces, de la part de pays alliés historiques d’Israël, intervient alors qu’Israël a intensifié son offensive à Gaza, déclenchée par une attaque meurtrière du mouvement islamiste palestinien Hamas en 2023. Mardi, une commission d’enquête indépendante mandatée par l’ONU a établi qu’Israël commettait un génocide contre les Palestiniens à Gaza, ce que les autorités israéliennes ont nié.
Avant même les annonces de dimanche, le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a promis de « lutter à l’ONU et sur tous les autres terrains contre la propagande mensongère à notre encontre et contre les appels à la création d’un Etat palestinien qui mettrait en danger notre existence et constituerait une récompense absurde pour le terrorisme ».
« La communauté internationale nous entendra à ce sujet dans les prochains jours », a-t-il ajouté.
Son ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, a par provocation proposé l’annexion « immédiate » de la Cisjordanie.
Le président palestinien Mahmoud Abbas a pour sa part estimé que la décision britannique est un pas vers une paix « durable ».
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