Selon une récente étude, les compagnies aériennes souhaitent visiblement réduire leurs coûts liés aux indemnisations obligatoires des passagers de l’Union européenne en cas de retards ou d’annulations de vols. L’an dernier, elles ont en effet trouvé de nombreux prétextes pour ne pas verser de compensations.
“Comme votre vol a été annulé pour une raison indépendante de notre volonté, il ne peut malheureusement pas faire l’objet d’une indemnisation”, la réponse qu’a reçue Nelly le 17 juillet dernier du service clientèle d’easyJet est aussi lapidaire que fausse. Lorsque cette Toulousaine de 46 ans est arrivée à Orly, le 2 juillet 2025 en fin d’après-midi, pour rentrer chez elle après un déplacement professionnel, elle a découvert que son vol venait d’être annulé. Aucune alternative ne lui a été proposée. Il a alors fallu qu’elle se rende à la hâte à l’aéroport Paris-Charles de Gaulle pour prendre le dernier vol d’Air France de la journée à destination de Toulouse-Blagnac.
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Quelques jours plus tard, elle a donc logiquement demandé à être indemnisée auprès de la compagnie. Mais la low-cost britannique n’a rien voulu savoir. “Le jour de votre vol, des grèves locales en France devaient avoir lieu. L’action syndicale a eu un impact sur le contrôle du trafic aérien”, se défend easyJet. Un argument qui ne tient pas selon Nelly… “Le 2 juillet, il n’y avait absolument aucun mouvement social, une grève des contrôleurs aériens était prévue le lendemain, mais il n’y avait aucune perturbation ce jour-là”, proteste-t-elle. Elle s’est donc tournée vers AirHelp, une société spécialisée dans le recouvrement des indemnités dues aux passagers aériens. À ce jour, easyJet n’a pas versé le moindre euro.

Les compagnies aériennes ont refusé plus de la moitié des réclamations légitimes
Cette histoire est loin d’être un cas isolé. Les compagnies aériennes rechigneraient en effet de plus en plus à dédommager leurs clients. Selon une récente étude d’AirHelp, sur les 2,5 millions de voyageurs ayant voyagé depuis ou vers la France et éligibles à une indemnisation l’an dernier, environ 1,3 million n’aurait rien obtenu.
Dans 26 % des cas, les compagnies ont fait la politique de l’autruche et ignoré, purement et simplement, la demande de leur client. Dans 21 % des cas, elles ont invoqué des conditions météorologiques défavorables (21 %) alors même qu’aucune preuve tangible, comme des vents violents ou de fortes précipitations, n’a été constatée. Le rejet de justificatifs, pourtant valides, arrive en deuxième position (13 %) des motifs injustifiés avancés pour ne pas verser d’indemnités. Des retards du contrôle aérien (9 %), totalement fictifs, arrivent enfin à la troisième place de ce podium des fausses excuses.
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La législation européenne est pourtant très claire sur le sujet. En cas de retard de plus de 3 heures ou d’annulation de vol, les transporteurs ont en effet l’obligation, sauf circonstances extraordinaires, de verser une indemnisation plus ou moins importante en fonction de la distance parcourue. Cela va de 250 € par passager pour les trajets de moins de 1 500 km, à 400 € pour les vols compris entre 1 500 et 3 500 km, et jusqu’à 600 € pour les vols au-delà.
Une stratégie globale pour limiter les coûts
Selon AirHelp, ces nouvelles pratiques des compagnies aériennes « traduisent une stratégie globale visant à limiter les coûts liés aux indemnisations obligatoires […] dans un contexte particulièrement délicat pour la défense des droits des consommateurs. » À la fin de l’année, le Parlement européen doit en effet débattre et voter la proposition du Conseil de l’Union européenne qui vise à réviser les droits des passagers aériens dans l’UE. En cas d’adoption, elle introduirait des seuils de retard plus longs, une réduction des indemnités, des frais pour les bagages à main et des délais de réclamation plus stricts.
En attendant, plus de 660 000 passagers éligibles à une indemnisation pour des perturbations de vol au départ de la France ont été recensés au premier semestre 2025. On ignore combien seront indemnisés.